Depuis des années, des capacités de traitement et de communication numérique s’intègrent dans d’autres appareils que les ordinateurs : téléphones mobiles, automobiles, appareils électroménagers, machines-outils… Il y a déjà beaucoup plus de micro-processeurs dans ces objets qu’il n’y a d’ordinateurs. Le concept d’«informatique omniprésente» va beaucoup plus loin : il s’agit, en équipant de puces la plupart des objets, des espaces, voire des corps, de nous doter d’une capacité sans précédent de connaissance et d’action sur notre environnement – et sur nous-mêmes. Il s’agit aussi de changer le statut de l’informatique pour, c’est du moins le discours, la mettre au service des humains dans leurs besoins quotidiens – et ce faisant, de la faire «disparaître», s’enfouir, pour fonctionner presque à notre insu : Adam Greenfield, père du mot «everyware», parle de «dissoudre» l’informatique dans nos comportements de tous les jours («information processing dissolving in behavior»). L’Union européenne parle, elle, d’«intelligence ambiante», une vision dans laquelle «nous sommes entourés d’interfaces intelligentes et intuitives, insérées dans toutes sortes d’objets, et d’un environnement capable de réagir à la présence de différentes personnes d’une manière fluide, non-intrusive et souvent invisible.» Cette perspective n’est pas futuriste, elle commence déjà à se réaliser. Mais à y regarder de près, elle recèle un potentiel de transformation considérable dans notre rapport à la technique, aux objets, aux environnements et à nous-mêmes.

De quoi s’agit-il ?

L’informatique omniprésente s’appuie sur une série d’évolutions techniques convergentes : miniaturisation des processeurs, omniprésence des réseaux avec et sans-fil, «agents intelligents», réseaux auto-organisée, interfaces «naturelles»….

Des puces…

Des milliards de puces s’insèrent peu à peu dans (ou sur) les appareils domestiques, les emballages, les véhicules, les objets quotidiens, les espaces publics… mais aussi les 120 000 arbres de Paris, des zones inondables, des forêts incendiables, des animaux domestiques…

Antenne
Antenne RFID produite à partir d’une imprimante à jet d’encre (Cima NanoTech)|

Ces puces peuvent n’avoir qu’une fonction d’identification : les «étiquettes» RFID dites «passives», dépourvues de batterie, ne s’activent que lorsqu’elles passent sous le faisceau électromagnétique d’un lecteur, pour transmettre un identifiant. Elles coûtent très peu cher et sont faciles à produire : on sait même les imprimer. Elles remplaceront progressivement les codes-barre ainsi, probablement, que les cartes à puce (Navigo de la RATP, la carte Felica de Sony, utilisent déjà des puces de ce type). Mais des puces un peu plus complexes et (pour l’instant) plus grosses peuvent remplir d’autres fonctions : acquérir de l’information à partir de l’environnement à l’aide de capteurs (température, pression, humidité, son, lumière…) ; stocker et traiter certaines de ces informations ; les communiquer à d’autres puces ou à des centres de traitement ; et agir en retour, par l’intermédiaire d’«actionneurs» – ouvrir une porte, déclencher une alarme, arrêter ou reprendre l’arrosage d’un champ, contacter quelqu’un…