SITUATION

Les récents « systèmes nationaux d’innovation « analysés et théorisés par Freeman (1987), Lundvall (1992), Nelson (1993), Edquist (1997), engagent une redéfinition des organisations et des métiers de recherche et d’innovation pour répondre à l’impératif de valorisation économique de productions issues de l’Université. Au croisement de la recherche prospective et du développement de produits innovants naissent de nouvelles interfaces entre la science et l’industrie. De multiples arbitrages doivent permettre de moduler ces interfaces : le travail de recherche et de développement mobilisera un alliage hétérogène d’acteurs (chercheurs, industriels,usagers) qui travailleront ensemble pour articuler diverses lignes d’activités et objectifs ; le travail de valorisation produira différentes externalités et mises en marché sur des scènes sociales concurrentielles. L’organisation du travail, interdisciplinaire et par projet renouvèlera la nature des partenariats entre sciences, technologies et sociétés. Elle bousculera autant les identités professionnelles que les finalités de la recherche et de l’innovation scientifique ou industrielle. Les sciences et les techniques seront donc au coeur d’activités et de débats qui déborderont du cadre strict des laboratoires. L’expertise scientifique et les questions qu’elle soulève en sont une bonne illustration. Qu’entend-on par preuve scientifique ? De quelle nature seront les relations entre experts et décideurs ? De quelle manière les citoyens participeront-ils aux débats sur les sciences et les techniques ? Ces figures contemporaines et futures de la R&D reposeront sur des réseaux de relations hybrides entre public et privé, elles engageront un renouvellement des politiques publiques dans le domaine de la recherche et, finalement, la création d’entreprises innovantes à partir de la recherche (une multiplication des activités de transfert de technologie dans les institutions d’enseignement supérieur et de recherche).

Trois grandes questions ou problèmes sont posés par cette forme d’hybridation contemporaine de la recherche et du développement, du public et du privé, de la science et de l’industrie :

  • le problème de l’organisation de ces rapprochements, à travers la mise en œuvre et la régulation de nouvelles interfaces entre production, recherche-développement et innovation industrielle;
  • le problème de l’interdisciplinarité mise en jeu, susceptible de renouveler les mécanismes du travail collectif et de la formation des identités professionnelles;
  • le problème du marché ou de la « mise en marché « de produits, services et connaissances, pouvant faire l’objet d’attributions plurielles et de valorisations concurrentielles.

LEVIERS

  • création d’organisations innovantes issues de la recherche qui fluidifient l’interface entre le monde académique et industriel;
  • entreprises créées sur la base de connaissances scientifiques générées dans les universités et les organismes de recherche publics : « entreprises issues de la recherche «, RBSO (Research Based Spin-Offs) ; – Accords collectifs et partenariats dans la conception distribuée, instrumentée et située ;
  • Meilleure hiérarchisation des finalités académiques et économiques : connaissances, outils, œuvres ;
  • Épreuves d’évaluation et circulation des productions sur des scènes sociales différenciées ;
  • Nouveaux régimes d’attribution, formes d’appropriation et modes de valorisation de la production ;

VERROUS

  • commercialisation de la recherche publique ;

PARADIGMES

Les récentes politiques de R&D mises en oeuvre par la plupart de nos «systèmes d’innovation nationaux» font basculé vers un mode 2 de production des connaissances (Gibbons) dans lequel s’opère un plus fréquent couplage ou encastrement entre les problématiques scientifiques, industrielles et sociétales. L’enjeu réside dans l’articulation et la gestion organisationnelle de ces rapprochement, afin de mieux saisir et informer (ou accompagner) ces transformations en cours de l’organisation du travail de recherche et d’innovation avec les NTIC, ainsi que la renégociation des frontières qu’elle engage : entre science et industrie, entre œuvre et produit, leurs procédures d’évaluation, leurs redéfinitions des modes de propriété intellectuelle et leurs formes spécifiques de mise en marché.

EXPERTS

Gibbons, M. 1994. The New production of knowledge : the dynamics of science and research in contemporary societies. London, Sage, 179 p.
Helga Nowotny, Peter Scott, and Michael Gibbons, Re-Thinking Science: Knowledge and the Public in an Age of Uncertainty. London: Polity Press, 2001.
Leydesdorff, L. et Etzkowitz, H. 2000. «Le «mode 2» et la globalisation des systèmes d’innovation «nationaux». Le modèle à Triple Hélice des relations entre université, industrie et gouvernement.» Sociologie et Sociétés, vol.XXXII.1, pp.135-156.

RESSOURCES EN LIGNE

  • http://en.wikipedia.org/wiki/Mode_2 : theory of «knowledge production», put forth in 1994 by Michael Gibbons, Camille Limoges, Helga Nowotny, Simon Schwartzman, Peter Scott and Martin Trow in their book The new production of knowledge: the dynamics of science and research in contemporary societies (Sage).
  • http://www.ost.uqam.ca/ : l’Observatoire des sciences et des technologies (OST) est un organisme dédié à la mesure de la science, de la technologie et de l’innovation (STI). Montréal, Canada.
  • http://www.obs-ost.fr/ : l’Observatoire des sciences et des techniques (OST) conçoit et produit des indicateurs sur la recherche et le développement. Pour assurer cette mission, l’OST structure, à partir de sources multiples, une base de données sur la recherche internationale. L’OST met ses indicateurs et son expertise à la disposition des acteurs du système français de recherche et d’innovation.