SITUATION
Les mouvements migratoires semblent constituer à la fois un problème central pour le monde d’aujourd’hui et un enjeu déterminant pour celui de demain. Ils sont étroitement liés et dépendants de l’évolution des géopolitiques mondiales dans leurs aspects politiques, sociologiques et démographiques. D’après le rapport du Secrétaire général des Nations Unies sur les migrations internationales et le développement, remis en 2006 [1], le monde compterait près de 200 millions de migrants. Un tiers environ s’est rendu d’un pays en développement vers un autre et un autre tiers s’est déplacé d’un pays en développement vers un pays développé. Les plus forts taux de population immigrée se retrouvent dans les pays du Golfe Persique : 90% aux Émirats arabes unis, 86% au Qatar, 82% au Koweït.
- Pour les États, l’immigration peut permettre de faire face à un déficit des naissances ou encore assurer une quantité ou qualité de main d’œuvre suffisante.
- Pour le migrant, l’émigration peut avoir une ou plusieurs raisons : professionnelle (mission de longue durée à l’étranger) et études ; politique (réfugié politique fuyant les persécutions) ; sécuritaire, notamment en cas de guerre dans le pays d’origine ; économique (habitant de pays pauvres cherchant un meilleur niveau de vie dans les pays riches, éventuellement temporairement) ; personnelle (volonté de s’installer dans un pays par goût, par exemple si l’on se reconnaît dans ses valeurs) ; familiale (rejoindre le conjoint, l’enfant déjà installé) ; fiscale (l’installation dans un pays offrant un niveau d’imposition moins élevé).
Face au durcissement généralisé des politiques migratoires, l’immigration clandestine connaît une recrudescence dans la plupart des pays développés et devient une préoccupation majeure. Selon la revue de presse de Fortress Europe, 8.966 immigrés sont morts aux frontières de l’Europe depuis 1988, dont 3.079 sont disparus en mer. En mer Méditerranée ont perdu la vie 6.495 migrants. Dans le Canal de Sicile 2.023 personnes sont mortes, entre la Libye, l’Égypte, la Tunisie, Malte et l’Italie, dont 1.209 disparus et 35 autres ont perdu la vie le long des nouvelles routes entre l’Algerie et l’île de Sardaigne; 3.086 personnes sont mortes au large des îles Canaries et du détroit de Gibraltar entre le Maroc et l’Espagne, dont 1.277 disparus; 693 personnes sont mortes en mer Egée, entre la Turquie et la Grèce, dont 343 disparus; 553 personnes sont mortes en mer Adriatique, entre l’Albanie, le Montenegro et l’Italie, dont 250 disparus. À l’heure actuelle, le thème de l’immigration recouvre un grand nombre d’autres thèmes aussi disparates que l’immigration légale, l’immigration clandestine, le droit d’asile, le droit de vote des étrangers, la polygamie, le foulard islamique, l’islam, les jeunes de banlieue, etc. Comprendre et accompagner au mieux le phénomène de migration suppose de développer des connexions entre l’économie, la démographie, la sociologie, l’anthropologie, l’histoire, la géographie, la science politique et le droit. Au moins quatre éléments de contexte rendent cruciale la compréhension de ces interactions :
- l’importance de la mobilité des hommes et des femmes et la généralisation, à travers le monde et dans une région comme l’Europe, des circulations migratoires, la diversification ou la complexification de leurs formes, les transformations qu’elles apportent à l’ensemble des sociétés et des économies ;
- les besoins de main-d’œuvre générés dans plusieurs secteurs de l’économie, ou pour le développement de nouveaux services ;
- les tensions sur l’équilibre démographique et financier des dispositifs de protection sociale et d’assistance, et leurs liens avec la compétitivité des économies ;
- la récurrence des débats depuis un siècle autour des coûts sociaux, réels ou supposés, de l’immigration et leurs incidences tant en France qu’en Europe.
L’immigration apparaît comme une affaire de cohésion sociale et nationale où se mêlent les questions d’identité des uns et des autres, le rapport au passé, au présent et à l’avenir ; elle pose des enjeux de filiations, d’affiliations et d’appartenances. Dans ce contexte, les TIC jouent désormais un rôle important, en favorisant par exemple l’émergence de nouvelles démocraties alternatives fondées sur l’appartenance ethnique ou la représentation des sans papiers. Elles constitueraient dans ce cas un appui et une aide pour le travail social avec les migrants (adultes exclus, enfants scolarisés, primo-arrivants). À moins qu’elles ne soient mobilisés que comme instrument de contrôle et de répression au service de politiques gouvernementales hostiles aux migrations humaines (surveillance des frontières, traçage des migrants, etc.).